En Alsace, pendant les fêtes de l’avent, Hans TRAPP est le personnage qui accompagne souvent St Nicolas ou le Christkindel. Personnage sombre, grossier, il inspire la terreur aux enfants désobéissants. On pourrait le confondre avec le Père Fouettard, autre personnage sombre de l’avent. Mais sa légende puise ses racines dans la vie d’un homme qui a réellement existé dans le nord de l’Alsace, Hans von Trotha.
C’était au XV ème siècle. A cette époque, l’Alsace n’est pas telle que nous la connaissons aujourd’hui. Wissembourg et le château de Berwarstein se trouvent dans le Palatinat et appatient au Saint Empire romain germanique.
En 1450, le prince électeur du Palatinat acquiert le château de Berwartstein avec ses dépendances. En 1480, il le cède à Hans von Trotha pour récompenser sa loyauté. Cependant, l’ancien propriétaire, l’abbé de Wissembourg, conteste cette décision. Il estime que la vente du château n’a pas été régulière. Apprenant que « leur » château a été donné à un chevalier étranger, les moines demandent au prince électeur de revenir sur sa décision. Celui-ci, au contraire, confirme avoir offert le château à Hans von Trotha.
Un esprit vengeur
Voulant se venger des moines, Hans von Trotha fait ériger un barrage sur la rivière Lauter, qui traverse Wissembourg. Il dévie ainsi l’eau en amont de la ville. Le lac de retenue formé par le barrage inonde les terres de l’abbaye. Les moines sont en colère et réclament la destruction de l’ouvrage. Le chevalier s’exécute alors, détruisant le barrage, mais les eaux dévastent Wissembourg, causant de nombreux dégâts.
Pour obtenir justice, l’abbé de Wissembourg demande l’aide de l’empereur du Saint-Empire germanique. Devant l’inaction de celui-ci, il s’adresse au pape Innocent VIII. Après huit années de plaintes, c’est le pape Alexandre VI, qui accepte sa requête. Le pape convoque Hans von Trotha à comparaître devant le tribunal de Rome. Le chevalier refuse. Il envoie une lettre affirmant sa fidélité à l’Église, tout en accusant le pape de comportement immoral.
La réponse du pape est ferme : Hans von Trotha est excommunié. Cette sanction ne semble guère affecter le chevalier. L’excommunication est finalement levée deux ans après sa mort, survenue le 26 octobre 1503, dans son château de Berwartstein.
La légende prend le relais
Peu à peu, l’histoire du chevalier Hans von Trotha se transforme en légende. il devient Hans Trapp, un personnage terrifiant, utilisé pour effrayer les enfants.
Les habitants racontent que Hans von Trotha était un pillard, qu’il avait vendu son âme au diable et qu’il mangeait des enfants. Son nom se déforme pour devenir « Trapp », dérivé de « trappen », un verbe allemand signifiant « faire du bruit en marchant ». Parfois on l’appelle aussi Rupelz, faisant référence aux oripeaux qu’il porte. Il est souvent représenté avec des lambeaux de jute de bure épaisse et de peaux de bête
Selon la légende, Hans Trapp hanterait encore aujourd’hui la forêt autour du château de Berwartstein. Mais si vous souhaitez le voir, il vous suffit de vous rendre à Wissembourg à la nuit tombée, le quatrième dimanche de l’Avent. Une procession, menée par des moines, est suivie de jongleurs de feu et de musiciens. Hans Trapp fait alors son apparition, interrogeant les enfants sur leur comportement. Il est suivi d’un chariot où se trouve une cage pleine d’enfants qu’il a capturés, mais ceux-ci sont finalement sauvés par le bienveillant Christkindel. La soirée se termine par un feu d’artifice destiné à éloigner toutes les créatures malfaisantes.
On dit aussi que le Hans Trapp serait en réalité le valet de St Nicolas. Il conduit l’âne qui transporte la hotte chargée de cadeaux. Il se prénommerait Hans car c’est un prénom très répandu en Alsace. Le nom de Trapp lui aurait été donné en rapport à sa maladresse et au bruit qu’il fait en marchant.